Pierre Martin, Le risque vieillesse, une vieille histoire
« Je suis usé comme un canon de rebut, il ne me faut qu’un peu de tabac et Le Constitutionnel ». Le vieux colonel Chabert miraculé de la bataille d’Eylau campe le retraité de l’armée impériale, le « sans solde » plus que le demi-solde d’ailleurs puisque l’intrigue romanesque repose sur le retour d’un officier déclaré mort… Le présent papier entend revenir sur l’histoire de la retraite en France.
Sophie Bouverin, Pour une transparence des comptes et du financement des retraites
A l’aube d’une concertation sur les régimes de retraite obligatoires par répartition, la publication dans le rapport annuel du Conseil d’orientation des retraites (COR) d’excédents globaux pour 2021 et 2022 donne à nouveau une vision inexacte de leur situation financière actuelle. Sur le périmètre d’ensemble des retraites, le COR ne prend en effet en compte que les soldes des régimes qui ne sont pas équilibrés par l’Etat, laissant de côté les déficits, d’origine principalement démographique, qui affectent 30 % des retraites, concentrés sur les régimes d’agents publics (fonctionnaires, régimes spéciaux) et sur le régime des exploitants agricoles. La contribution réelle de l’Etat et des autres collectivités publiques à la couverture de ces déficits peut être estimée à 30 Md€, qui s’ajoutent aux concours importants des budgets publics pour compenser les exonérations de cotisations et les dépenses de solidarité. La part des retraites dans les déficits publics français n’est jamais identifiée alors qu’elle est importante (1,3 % du PIB). Ce biais de communication, assumé depuis longtemps pour éviter d’inquiéter sur les perspectives des retraites, retarde la prise de conscience de l’urgence des réformes et interdit de s’attaquer à une harmonisation à long terme des régimes. Compte tenu de l’ampleur réelle des besoins de financement globaux, il est probable que les mesures de report de l’âge minimal de départ en retraite actuellement envisagées, seront loin de suffire à rétablir l’équilibre à moyen terme des comptes de la protection sociale vieillesse en France.
Philippe Trainar, Les enjeux de la réforme des retraites en France
La réforme des retraites était la seule mesure significative de maîtrise des comptes publics qui figurait dans le programme électoral du candidat à la présidentielle. Une fois élu, le président de la République a eu raison de résister à la tentation de reporter la mesure. Le relèvement de l’âge effectif de départ à la retraite des Français constitue la clé de voûte de toute réforme sérieuse de notre système de retraite, et cela pour trois raisons principales : son déficit structurel, son caractère antinomique par rapport aux évolutions démographiques, l’absence de compensation au niveau de l’activité. Pour autant, l’allongement de la durée de vie active, dont nous verrons qu’elle doit être portée aussi vite que possible à 65 ans, correspond à une moyenne qui doit rester suffisamment flexible pour s’adapter, à la hausse comme à la baisse, aux situations particulières.
Alain Villemeur, Retraites, une modélisation éclairante
Une réforme des retraites est indispensable, mais il faut sortir du « faux débat » sur le report de l’âge légal du départ à la retraite. Le vrai défi est de hausser le taux d’emploi des seniors de plus de 55 ans d’environ dix points d’ici 2032, alors qu’il est particulièrement faible en France. Aussi, de multiples incitations (formation, conditions de travail, surcote, cumul emploi-retraite…) doivent-elles être mises en place. Une nouvelle modélisation macroéconomique de l’impact de cette réforme démontre tout son intérêt pour résorber l’ensemble des déficits prévus et redonner des marges.
Thomas Chardonnel, Stéphanie Cariou-Hellec et David Miseray, L’avenir des retraites supplémentaires
La réforme des retraites est de retour à l’agenda politique en France, en résonance avec le dernier rapport annuel du Conseil d’orientation des retraites (COR) paru en septembre 2022. Dans ce contexte, les dispositifs de retraite supplémentaire proposés par les assureurs auront à prendre une place déterminante et croissante en complément des régimes obligatoires afin de consolider les revenus des futurs retraités. Le Plan d’épargne retraite (PER) issu de la loi Pacte et le véhicule réglementaire de fonds de retraite professionnelle supplémentaire (FRPS) forment deux leviers encore récents qui sont à disposition et à combiner pour atteindre cet objectif. CNP Assurances, acteur engagé sur le marché de la retraite supplémentaire qui s’est récemment doté d’un FRPS, exprime ses convictions sur les enjeux et facteurs clés de succès de ce marché promis à un fort développement.
Virginie Le Mée, La retraite, un sujet de jeunes qui ne parle qu’aux vieux…
Depuis trois décennies, les réformes sur les retraites se sont multipliées sans pour autant réussir à équilibrer durablement le système. Aussi, se pose une fois de plus la question d’une nouvelle réforme. Les différents textes, et notamment celui initié en 1993, ont permis de diminuer les dépenses de retraite rapportées au PIB de plusieurs points. Sans ces réformes, les dépenses de retraite ne seraient pas de 14 % du PIB, mais plutôt de 18 % environ. Mais l’équilibre reste fragile, car notre système basé sur un principe de répartition ne fonctionne bien qu’avec une natalité forte, or ce n’est plus le cas aujourd’hui alors que l’espérance de vie est, elle, en hausse. Il est indispensable de compenser cette baisse de la natalité, la hausse de la durée de vie et l’augmentation des besoins de financement de la dépendance, sans remettre en cause notre système de base établi autour de la solidarité intergénérationnelle et garant du système de protection sociale en France. La solution de capitalisation individuelle et collective, en complément du régime par répartition, répond à ces enjeux, et permet de garantir le maintien du pouvoir d’achat pour les retraités.
François-Xavier Selleret et Cécile Vokléber, Le transfert du recouvrement aux Urssaf, une réforme des retraites par le bas ?
La mesure soutenue par le gouvernement soulève un débat de fond sur la vivacité de notre démocratie. Derrière un sujet d’apparence technique, se jouent des questions éminemment politiques au moment où le financement des retraites va revenir dans le débat public, notamment celle du rôle des partenaires sociaux qui ont démontré leur capacité à gérer efficacement le régime Agirc-Arrco. C’est aussi la préservation du consentement à la cotisation et de la confiance des Français qui est en jeu, à travers la sécurisation du lien entre les cotisations et les droits.
Xavier Autain, Quel avenir pour les régimes professionnels ?
L’ombre portée d’une réforme des retraites sort des brumes dans lesquelles l’épidémie de Covid-19 l’avait plongée au début de l’année 2020, angoissant plus d’un à commencer par les barreaux français. Vous avez peut-être encore en tête ce jet de leurs robes noires au pied d’un ministre de la Justice sans voix, et sans solution. Mais pourquoi diable des avocats en vinrent à défiler aux côtés de salariés ou d’agents de la fonction publique, dans une même opposition à ce projet gouvernemental. Comment une profession libérale, pourtant sensible aux sirènes du macronisme économique, en est-elle venue à contester ce projet de loi gouvernemental ?