Pierre-Charles Pradier, Introduction au dossier
Joëlle Durieux, Le poids croissant des assurtechs dans le secteur de l’assurance
La transformation numérique des assureurs est résolument en marche, comme le prouvent plusieurs études récentes et surtout l’émergence d’un nouvel écosystème riche de start-up appelées assurtechs (contraction d’« assurance » et de « technologie »), déclinaison des fintechs pour l’industrie financière au sens large.
Philippe Lepeuple, Quel impact des assurtechs sur le milieu de l’assurance ?
Si l’on devait plancher au bac philo sur la question posée dans le titre de cet article, il conviendrait d’en définir soigneusement chaque terme. Vous ne m’en voudrez pas de n’aborder que le terme « assurtech » : le sens des autres mots est, il me semble, largement partagé. (Pour autant, le processus de « transformation » étant continu, il n’est pas aisé de savoir à partir de quel stade de « transformation » il convient de répondre par l’affirmative à la question posée.) Dans un premier temps, nous partagerons donc quelques réflexions sur ce que l’on entend par « assurtech ». Puis nous parlerons des liens entre le monde des start-up (dont les assurtech) et celui des grands comptes dans le secteur de l’assurance (assureurs, mutuelles et institutions de prévoyance), tenant pour acquis que c’est ce qui constitue le « milieu de l’assurance ». Pour me faire pardonner d’avoir évoqué le bac philo auprès du lectorat de la présente revue, je vous proposerai un petit détour par le fameux théorème d’incomplétude (ou d’indécidabilité) de Kurt Gödel. Certains prendront cela comme une coquetterie et ils auront sans doute raison ; mais il ne m’est pas souvent offert de m’adresser à une tribune de scientifiques, alors je ne vais pas bouder cette occasion d’évoquer l’une des manifestations les plus prodigieuses de l’esprit humain (versant mathématique).
Eric Maumy, Les assurtechs changent-elles l’assurance des entreprises ?
Longtemps épargné, le secteur de l’assurance des entreprises est touché de plein fouet par la révolution numérique et l’émergence de start-up qui bousculent les modèles établis. Si la disruption n’est pas aussi radicale que dans d’autres industries, comme celles des médias ou du retail, ou aussi engagée que dans l’assurance de masse (épargne, habitation, automobile, assurance vie…), les assurtechs obligent le monde de l’assurance à se réinventer, à fonctionner autrement, à s’intégrer dans des écosystèmes plus larges, à innover plus rapidement… Alors que des start-up rencontrent des succès qui posent les bases d’une assurance 3.0, les vrais défis sont à venir pour une industrie peu habituée aux rythmes de transformation effrénés. Paradoxalement, les courtiers en assurance, qui ont trusté la relation directe avec les entreprises, en offrant une expérience client plus aboutie que les assureurs, pourraient être plus directement touchés que les assureurs eux-mêmes par le tsunami de la révolution numérique et l’émergence des assurtechs.
Fabrice Couturier, Les assurtechs changent-elles le métier de l’assurance ?
De plus en plus valorisé aujourd’hui dans le monde de l’assurance, l’assurtech est une des branches de la fintech qui cherche à développer l’innovation technologique au service de l’assurance. Le développement des assurtechs, évolution sensible sur le marché français et européen, change la donne pour les sociétés d’assurance et l’ensemble des acteurs dont l’activité s’insère dans la chaîne de valeur assurancielle.
Fabien Giuliani, Les fintechs remodélisent la chaîne de valeur
Comptant pour près de 30 % des montants investis dans les fintechs françaises en 2017, Arkéa se positionne comme un acteur incontournable pour l’écosystème des start-up financières hexagonales. Le réseau bancaire breton compte dans son vivier certaines pépites parmi les plus prometteuses, dont Leetchi, Fluo, Pumpkin ou Masuccession.fr. Le positionnement d’un groupe de bancassurance mutualiste comme premier investisseur fintech a de quoi surprendre. Il atteste la réussite d’Arkéa à intégrer deux mutations structurantes de l’activité de bancassurance au cours des trente dernières années : l’essor des systèmes d’information (SI) et l’émergence d’une concurrence basée sur les usages.
Eric Sibony, L’intelligence artificielle peut-elle bouleverser le secteur de l’assurance ?
Interview
Pierre-Charles Pradier, Lemonade, l’assurtech qui fait « pschitt » ?
Les articles du présent dossier tendent à situer l’effet visible des assurtechs dans la relation avec les courtiers ou avec les sous-traitants, c’est-à-dire dans les coulisses de l’assurance, de sorte que le grand public resterait à l’écart du spectacle. C’est un peu le contraire du « paradoxe de Solow », qui voyait des ordinateurs partout, sauf dans les statistiques de productivité : dans l’assurance, on ne voit pas les avancées technologiques qui font progresser tout le secteur. Il y a bien pourtant quelques intrépides entreprises qui ont choisi d’exposer leurs nouveautés : de ce côté-ci de l’Atlantique, les assureurs ont été sensibles au démarrage de jeunes pousses américaines qui ne passent pas inaperçues, soit qu’elles perdent beaucoup d’argent, soit qu’en prime elles critiquent ouvertement les usages du secteur. Lemonade Insurance représente ainsi un cas d’école : si, comme d’autres entreprises d’assurance, elle propose une offre tout en ligne (pure player) et perd beaucoup d’argent en ciblant une clientèle plutôt étroite, elle concentre l’animosité de la concurrence avec un marketing agressif et une autosatisfaction à toute épreuve. Au point qu’on peut se demander si Lemonade n’est pas qu’un coup de bluff…
Didier Warzée, Le phénomène assurtech en France
Les assurtechs ont pris la suite des activités de paiement et du financement participatif pour alimenter la croissance du phénomène fintech. L’engouement des médias autour du terme « assurtech » a ainsi récemment crû, de même que les investissements dans les start-up exerçant dans ce secteur. Ces start-up sont un facteur important de la numérisation et de l’innovation numérique dans le secteur assuranciel. Tout comme l’innovation au sens plus large, elles sont porteuses de bénéfices comme de risques potentiels pour assureurs et assurés, et l’ACPR suit attentivement les enjeux afférents, notamment au sein des instances internationales.