Le concept de transition est désormais au coeur de toutes nos réflexions. Il n’empêche qu’on ne connaît ni sa durée ni réellement son point d’aboutissement, cependant il nous est difficile d’appréhender notre avenir si l’on ne parle ni de transition climatique, ni de transition numérique ou démographique.
Rappelons-le, le terme de transition, dans une version étroite, a été popularisé par Rob Hopkins, initiateur du mouvement mondial des villes en transition, dans son Manuel de Transition en 2008. Mais en réalité dans notre esprit, il nous faut aller beaucoup plus loin, une transition peut donc d’abord être un changement observé, en cours ou terminé, un changement que l’on tente de modéliser de manière plus ou moins formelle, pour mieux en comprendre la dynamique. Mais ces changements majeurs ont des conséquences globales, qui bouleversent les organisations socio-économiques, les systèmes productifs, les modes d’habiter. En fait une transition peut porter un projet de société qui s’incarne dans des politiques publiques, que ces politiques soient transversales comme pour les transitions territoriales ou écologiques ou sectorielles pour les transitions énergétiques ou agro-alimentaires par exemple. C’est là le cœur de notre discussion, la transition suppose une intentionnalité et des actions collectives.
Tout ceci ressort d’analyses spéculatives, mais il nous faut confronter ces incertitudes, dont on essaie de donner une lecture rationnelle, à des événements totalement imprévus et d’une gravité exceptionnelle, qui prennent toute leur ampleur dans ces périodes de transition. C’est là tout l’apport de l’approche de ce numéro 139 de Risques, réintroduire des hypothèses majeures, pour nos sociétés et donc pour l’assurance, celles des risques extrêmes. Pourquoi les envisager maintenant alors qu’ils ont toujours existé, mais qu’on ne les évoquait que peu ? Tout simplement, car nous sommes dans ces phases de transition, vers des avenirs inconnus. La seule référence que l’histoire nous rapporte, c’est celle du rôle que l’homme a pu jouer dans ces risques, le fameux débat entre Voltaire et Rousseau à propos du tremblement de terre de Lisbonne ! Nous avons donc voulu aborder le sujet à travers l’interview d’un grand spécialiste des pandémies, Arnaud Fontanet. Dans les nombreuses réponses qu’il apporte, il y a celle qui porte sur un élément totalement imprévisible. Il y a sa réponse, si passionnante, si pénétrante, sur ce qui peut faire d’une épidémie un drame pandémique. Mais nous avons également abordé tout ce qui apparaît comme risques extrêmes en concluant par la manière dont l’assurance peut apporter des réponses. Sur ce point, l’apport de la tribune d’Édouard Vieillefond sur la réassurance élargie des catastrophes naturelles est particulièrement éclairant.
Il nous a semblé aussi très important d’évoquer un thème qui sera fondamental pour l’assurance dans ces périodes nouvelles où la consommation des différentes générations se transforme profondément, en donnant à la pratique des sports un rôle majeur. Là, il y a des prévisions mais pas d’incertitude absolue. Comme nous venons de le vivre, la communauté mondiale sait organiser un grand événement de paix à travers les Jeux olympiques. Mais nous n’en sommes qu’à l’amorce de ce qui accompagnera, sans nul doute, ces longues phases de transition que nous allons connaître et où il nous faut savoir le rôle que l’assurance pourrait y jouer.
Ainsi, les trois éléments des années qui viennent se trouvent réunis : des transitions largement prévisibles, des risques extrêmes qui peuvent perturber l’évolution de nos sociétés et une interrogation sur le rôle majeur que l’assurance jouera pour favoriser de nouveaux modes de vie.