La rubrique « Risques et solutions » de votre revue a choisi de s’intéresser au sujet de la prévention en santé. La prévention, qui consiste à développer des actions de nature à réduire la survenance d’événements dommageables, est une composante essentielle de l’assurance. Ainsi, en assurance de biens et de responsabilité des assureurs comme Factory Mutual ont été à l’origine des standards de prévention contre l’incendie. De même, la Prévention routière, créée à l’initiative de l’assurance française, œuvre depuis des années à réduire la survenance des accidents de la route.
Pourtant le sujet de la prévention en santé est beaucoup plus complexe que dans les exemples cités ci-dessus. Il nous faut d’abord souligner l’importance des enjeux des politiques de santé : en 2019 ces dernières représentaient 208 milliards d’euros, soit 8,8 points de PIB. Les débats autour du « trou » de la Sécurité sociale sont depuis des décennies parmi les plus clivants de la société française.
Une autre caractéristique importante est que la prévention se fait à la confluence de la politique de santé largement pilotée par la puissance publique et du désir légitime de liberté individuelle qui anime les citoyens. La pandémie de la Covid-19 a parfaitement illustré la rencontre – parfois conflictuelle – entre les mesures de prévention décidées par le gouvernement et le libre arbitre de chacun.
Le système français à deux étages qui fait intervenir les assureurs en complément de la Sécurité sociale complexifie à la fois leur rôle dans la couverture des dépenses et leur capacité à mettre en place des mesures de prévention, alors même que ce savoir-faire leur est parfaitement reconnu.
Enfin les évolutions des politiques de santé se font dans le contexte de la révolution digitale : explosion du stockage et de l’utilisation des datas, toute-puissance des Gafam et débat autour de la protection des données personnelles.
L’article qui ouvre cette rubrique replace la prévention santé dans le contexte historique des différentes politiques de santé publique. Regrettant la prévalence d’une logique annuelle et comptable et un système qui s’apparente plus à une assurance maladie qu’à une assurance santé, Mathilde Viennot appelle à un large débat de société devant conduire à des réformes significatives des politiques publiques.
Morgane Plantier et Jean-Louis Rullière analysent les relations contrariées entre prévoyance et assurance. Ils soulignent l’apport positif de l’économie comportementale (théorie du choix rationnel, psychologie sociale) pour surmonter l’opposition entre efficacité et liberté de choix.
Isabelle Hébert présente une vision ambitieuse de ce que devrait être la prévention en santé au XXIe siècle. De son point de vue, celle-ci devrait davantage s’inspirer des meilleures pratiques internationales, s’appuyer sur un nouvel usage du digital et des données tout en renforçant son volet humain, notamment en agissant dans les différentes communautés auxquelles nous appartenons.
L’article de Laurent Borella et d’Anne-Sophie Godon-Rensonnet présente le rôle positif des assureurs santé dans le développement des initiatives de prévention. Ils soulignent le rôle important de l’entreprise comme lieu privilégié de ces actions de prévention et le formidable levier que représenterait une meilleure utilisation des données.
De son côté, Didier Bazzocchi étudie également le rôle des assureurs santé dans la politique de prévention en insistant sur le bénéfice qu’apporterait une meilleure coopération entre acteurs privés et Etat.
Enfin, cette rubrique se clôt par l’article d’Axel Zoma qui analyse, dans un contexte de post-pandémie, l’impact positif de la protection sociale sur les démarches de responsabilité sociale et environnementale (RSE) des entreprises.
Je vous souhaite une bonne lecture de ces articles passionnants.