Il suffit d’une promenade dans les rues de Paris pour réaliser l’importance de l’immobilier dans la gestion des actifs des assureurs ; en levant un peu les yeux on aperçoit en effet sur nombre d’immeubles haussmanniens des plaques au charme un peu désuet, qui attestent que le bâtiment en question appartient à telle ou telle compagnie dont le nom pittoresque fait parfois penser qu’elle a disparu. En regardant de plus près le promeneur distingue deux catégories d’inscription : certaines plaques peuvent indiquer que l’immeuble appartient à une entreprise d’assurance, d’autres précisent qu’il est la possession des assurés de cette entreprise. Cette distinction correspond bien à la double nature des investissements, qu’ils soient réalisés pour le propre compte des assureurs ou bien dans des véhicules du type unités de compte.
Bien plus qu’une classe d’actifs comme les autres, l’immobilier est depuis toujours l’un des fondements de l’organisation de toute société humaine comme l’atteste l’intensité des débats actuels sur le logement, le télétravail ou les établissements pour personnes dépendantes. Aussi, il nous semble légitime et intéressant de consacrer la rubrique Risques et solutions de votre revue au rôle des assureurs en tant qu’investisseurs dans l’immobilier.
L’article de José Bardaji et Pierre-Charles Pradier qui ouvre cette rubrique, analyse l’investissement des assureurs dans l’immobilier sur une longue période en s’appuyant sur les données issues de la comptabilité des sociétés d’assurance. Ainsi, il présente très clairement comment s’articulent les politiques d’investissement des assureurs au fil du temps, dictées par la conjoncture économique et la réglementation.
Carole de Rozières expose quant à elle le point de vue des réassureurs. Les caractéristiques de l’investissement immobilier – rendement récurrent, protection contre l’inflation et diversification – en font un placement bien adapté aux contraintes de gestion actif-passif des réassureurs. Pour autant, la politique de placement doit évoluer pour relever les défis que sont la hausse des taux, les nouveaux usages ou les contraintes environnementales.
Pour Nathalie Robin, l’immobilier n’est pas un investissement comme les autres, c’est un bien réel dans lequel nous vivons et nous travaillons. Si sa gestion est rendue complexe par les défis et les contraintes actuels – nouveaux usages, hausse des taux, réglementations esthétiques et environnementales – l’immobilier reste un élément essentiel de l’organisation de toute société.
L’article d’Eric Donnet affirme l’engagement d’un grand assureur à investir dans l’immobilier malgré les risques d’une crise à venir causée par la hausse des taux et les nouveaux modes de travail. Ce soutien s’explique par les caractéristiques financières et les performances de cet actif, mais également par son rôle social fondamental.
Xavier Lépine présente tout d’abord un panorama très complet des blocages et tensions qui s’exercent dans le financement de l’immobilier en France. Puis, face à cette situation il souligne l’impérative nécessité d’innovations fortes afin de faire émerger de nouveaux mécanismes de financement capables de desserrer les contraintes actuelles.
L’article de Gilles Saint-Paul, qui clôt cette rubrique, propose une analyse économique et financière de la formation des prix dans l’immobilier. Il montre ainsi les apports de la théorie financière classique mais aussi les limites rencontrées quand il s’agit de prévoir la formation et l’évolution des prix des actifs immobiliers.