Nous sommes plongés dans une période vraisemblablement unique dans l’histoire des deux derniers siècles. La convergence entre quatre crises n’a effectivement jamais eu lieu : crise pandémique, crise géostratégique, crise monétaire et crise climatique. Bien entendu, les interrelations entre ces différents chocs sont grandes et la volonté de bâtir un modèle de croissance inclusif ne nous a pas quittés. Le brouillard dans lequel nous sommes ne nous interdit pas, loin de là, de souhaiter bâtir une croissance durable, plus équilibrée, et plus répartie dans le monde. Cette ambition paradoxale donne aux politiques menées à tous les échelons un statut très particulier de volonté de surmonter les incertitudes et de se fixer un cap de moyen et long terme, même si nous sommes confrontés à un court terme difficilement gérable. Et c’est là où le rôle de tous les acteurs devient si important. Nous avions pris l’habitude de placer notre sort entre les mains de l’Etat de manière quasi exclusive. Mais les choses changent. Il est désormais certain que l’entreprise sera au cœur des transformations de notre société, qu’elle sera le principal facteur de transformation et d’adaptation à une situation qui nécessite détermination et agilité. C’est exactement le thème que ce numéro 132 a mis en valeur. La société française commence à le vivre, comme le montre l’évolution que nous avons connue dans le domaine de l’apprentissage, où après des décennies de relative impuissance, le fait de donner aux entreprises le rôle majeur dans la mise en œuvre des politiques dans ce domaine a permis une transformation profonde, quantitative et qualitative.
Toute notre réflexion est tournée vers cette collectivité si particulière que représentent les entreprises, et ceci encore plus spécifiquement dans le domaine de l’assurance. C’est à travers elles que peuvent être résolus les trois grands problèmes auxquels la société française est confrontée, à savoir le sens que chacun donne à son travail, et donc l’envie d’imaginer une vie professionnelle forte et épanouissante ; le besoin de formation nécessaire à l’évolution de nos carrières ; et enfin, la résolution de ce problème si sensible dans notre pays, celui de la fin de notre vie professionnelle, donc les retraites. Donc au centre de toute prospection se trouve un couple éternel solide, l’entreprise et l’individu. Cette démarche pour Risques commence évidemment par l’interview d’Adrien Couret, qui met en lumière les valeurs spécifiques aux sociétés mutualistes et qui répond, plus particulièrement, à ce besoin jamais abandonné de bâtir une croissance économique forte de sens et de prise en compte des besoins de nos sociétés. Faut-il encore que la population y soit préparée et c’est là que se trouve tout l’intérêt de la rubrique « Analyses et défis », mettre l’accent sur la qualification à donner de manière permanente à ces centaines de milliers de personnes qui travaillent aujourd’hui dans le milieu de l’assurance.
N’oublions pas que nous sommes confrontés, là comme ailleurs, à des tensions fortes sur le marché du travail et qu’il nous faut donner aux uns et aux autres la possibilité de faire évoluer les carrières, d’améliorer leur positionnement professionnel, et donc de donner aux demandeurs d’emploi ou à ceux qui aujourd’hui travaillent dans notre secteur, une véritable attractivité.
Ce problème, on le retrouve dans l’analyse fouillée que fait ce numéro 132 dans la rubrique « Risques et solutions » sur la question des retraites. Certes, l’âge légal de départ à la retraite est une des conditions importantes d’un rééquilibrage de nos comptes mais l’essentiel n’est pas là. Il est dans les taux d’activité des seniors car comme on le sait, notre système économique pousse au chômage ou à la préretraite une partie importante de la population de plus de 55 ans. Là également, la formation continue tout au long de la vie est une clé du maintien des personnels en activité et derrière cela, de création de plus de richesse. Ce phénomène de marginalisation des plus âgés touche moins le secteur de l’assurance que bien d’autres, mais il nous faut cependant aller encore beaucoup plus loin. Comme pour la formation, le taux d’activité sera déterminant pour l’avenir et l’équilibre de notre société. En disant cela, on complète cette vision d’une croissance inclusive et l’on s’autorise à donner aux entreprises d’assurance, quel que soit leur statut juridique, un rôle moteur pour faire évoluer dans ce sens la société française.