Patrick Thourot, Les risques de la sphère publique. Essai de nomenclature
L’exposition de la sphère publique au risque est aujourd’hui considérée comme essentiellement le fait des risques extrêmes, tels que les événements naturels. Les pouvoirs publics sont en réalité exposés à un univers de risques en pleine expansion : risques de type industriel, risques liés à l’action régalienne de protection multiforme de la société, risques de responsabilité du fait des autorisations administratives que multiplient les réglementations. Ne faut-il pas instituer un Chief Risk Officer pour donner une vision globale de l’exposition de la sphère publique aux risques et développer la culture du risque dans les administrations publiques ?
Philippe Trainar et Patrick Thourot, La prise en compte du risque dans la décision publique
Cet article analyse et commente l’étude de l’assemblée plénière du Conseil d’État « La prise en compte du risque dans la décision publique » adoptée le 26 avril 2018 ; étude menée à la demande du Premier ministre, sous la direction de Jean-Ludovic Silicani. Le rapport du Conseil d’État analyse à la fois l’attitude des pouvoirs publics à l’égard des risques encourus par la société et les conditions de la prise de risque par les pouvoirs publics, en affirmant que le risque est au cœur des missions des agents publics et que le défi de l’État moderne est bien d’y préparer les décideurs, en vue d’une « action publique plus audacieuse ».
Bertrand Labilloy, L’État, réassureur en dernier ressort des grands risques de la nation
« L’univers des risques est en expansion » a l’habitude de proclamer Denis Kessler. De fait, nos sociétés modernes, qui se targuent de tout contrôler et de tout prévoir, se font régulièrement surprendre par des catastrophes qu’elles n’auraient jamais imaginées. Et à chaque fois, le même scénario se reproduit. On constate que les couvertures d’assurance indemnisent peu ou mal les dommages subis ; l’État finit par en payer tout ou partie afin de ne pas ajouter la crise à la catastrophe ; puis, il met en place une obligation de couverture assortie d’une garantie pour pallier les insuffisances du marché et éviter que pareille mésaventure ne se reproduise. Dans la foulée de la pandémie de Covid-19, ce scénario est en train de se reproduire. Aussi est-on en droit de s’interroger : ce scénario est-il fatal ? La solution à laquelle il conduit est-elle pertinente ? Deux questions clés sur le fonctionnement des marchés et le rôle de l’État.
Marie-Anne Barbat-Layani, La gestion des risques au sein des ministères financiers
La crise sanitaire que nous traversons est la matérialisation d’un risque : elle interroge donc à la fois notre capacité d’anticipation et d’identification des risques, et notre organisation. Il est trop tôt pour en faire un bilan, même si nous avons engagé un retour d’expérience dès la fin de la phase aiguë de la crise, mais c’est l’occasion pour moi de revenir sur mon expérience de la gestion crise. Par ailleurs, au-delà de cette phase de matérialisation d’un risque majeur, le ministère de l’Économie et des Finances se doit de renforcer sans arrêt sa capacité à identifier et maîtriser les risques de toute nature auxquels le confrontent ses activités. Ne serait-ce que par l’ampleur des enjeux financiers qui s’attachent à ses activités, les flux gérés atteignant ainsi 1 000 Md€ au cours d’une même année. La démarche de maîtrise des risques est donc une des activités clés pilotées par le secrétariat général qui a renforcé, au cours des dernières années, la gouvernance et les outils de cette gestion des risques.
Bénédicte Dollfus, Expériences étrangères en matière de risk management public
Dans un univers de risques croissants et parfois mondialisés, tels le risque cyber ou la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19, et de populations toujours plus soucieuses de protection et de sécurité, les États réagissent différemment. Face à l’ampleur de crises comme celle que nous traversons actuellement, les gouvernements restent souvent démunis et gèrent la situation dans l’urgence. Au-delà de cette crise, les analyses et recommandations antérieures d’organismes internationaux comme l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et la Banque mondiale refont surface avec l’utilité d’un risk management public, centré d’une part sur une fonction pivot de risk management pays, d’autre part sur les structures et mesures à mettre en œuvre pour prévenir et gérer au mieux les catastrophes et les crises. Quelques exemples étrangers montrent la sensibilité de certains États à une amorce de risk management intégré.
François Vilnet, Pour une refondation du risk management public
L’image du risk management public, au sens de la gestion globale des risques publics de toute nature, a été récemment écornée dans la gestion de la crise de Covid-19 par les autorités publiques et sanitaires, qui a donné lieu à des critiques et polémiques. Par son ampleur et ses conséquences à long terme, cette crise est aussi une occasion bénéfique de tirer des leçons dans la gestion des risques publics majeurs (analyse, besoins, prévention et limitation, gestion). Cet article constitue une introduction et propose des pistes de réflexion pour une nouvelle approche du risk management public qui se pose à tout État qui se veut autant stratège que gestionnaire.
David Dubois, Repenser les choix de politique publique à l’aune de la gestion des risques
Entreprendre et vivre, c’est prendre des risques. Chacun de nous, chaque citoyen, chaque entrepreneur le sait bien, même si, à l’évidence, nous ne sommes pas toujours prêts à en assumer ni individuellement ni collectivement les conséquences. Si les entreprises ont été contraintes, tant par la réglementation que par les faits, de déployer l’ERM (Enterprise Risk management) en leur sein, les pouvoirs publics semblent encore loin d’avoir intégré une démarche ERM dans leurs processus décisionnels, qu’ils relèvent de changements réglementaires ou de l’administration du pays.
François Ewald et Laurence Barry, Petit cours de biopolitique théorique (Michel Foucault) et appliquée (Covid-19)
Dans les années 1970, Michel Foucault invente le concept de biopolitique pour décrire la transformation moderne (et statistique) de l’exercice du pouvoir. Ce concept a souvent été avancé au sujet de la crise du Covid-19. À l’initiative de Florence Picard, l’Institut des actuaires organisait le 6 mai 2020 une visioconférence pour repenser avec Foucault nos outils de gouvernement de l’épidémie. François Ewald, interrogé par Laurence Barry, poursuit ici cette réflexion.